Redémarrage avec succès de l’accélérateur LHC au CERN !

Développements techniques Physique des particules

Le 22 avril vers 9h, les premières collisions ont été enregistrées par les quatre grandes expériences de l'accélérateur LHC du CERN. Quelques semaines plus tôt, le 8 avril, les premiers faisceaux de l’année circulaient déjà, signant la fin de l'arrêt hivernal 2024-2025, et le début d’une année de prise de données aux objectifs ambitieux.

Après une année 2024 de tous les records, le LHC revient cette année avec l’ambition de renouveler l’exploit. Depuis les premiers faisceaux début avril, les ajustements fins de l’optique de l’accélérateur, les mesures de décroissance des faisceaux, la formation des paquets de protons, ou encore la montée en énergie, se succèdent de jour comme de nuit. Les premières collisions marquent une étape importante dans le processus de préparation des faisceaux. 

Image de la page publique du LHC montrant la trace des premiers faisceaux de 2025 dans l’anneau du LHC le 8 avril
Image de la page publique du LHC montrant la trace des premiers faisceaux de 2025 dans l’anneau du LHC le 8 avril. 

Du côté des expériences, les équipes n’ont pas attendu ces premières collisions pour lancer les procédures de redémarrage des détecteurs géants. Depuis plusieurs semaines, les équipes des détecteurs, des systèmes d’acquisition et de sélection d'événements sont à pied d'œuvre, au côté de celles chargées des infrastructures de traitement et de stockage des données. Les rayons cosmiques arrivant jusqu’aux cavernes expérimentales sont de précieux signaux, et sont utilisés pour les premières calibrations et l'alignement des détecteurs. Il s’agit également de bien définir et tester les sélections d'événements qui seront au cœur des programmes de physique. D’autre part, lorsque début avril sont arrivés les premiers faisceaux, bien avant les collisions, les protons ont interagi avec les collimateurs situés de part de d’autres des cavernes expérimentales, générant de grandes bouffées de particules (splash) aussi très utiles pour l’alignement temporel des calorimètres. 

Evénements de type ‘splash’ (interaction du faisceau avec les collimateurs situés de part de d’autres des cavernes) dans Atlas et CMS. Crédit Expériences Atlas et CMS
Événements de type ‘splash’ (interaction du faisceau avec les collimateurs situés de part de d’autres des cavernes) dans ATLAS et CMS. Image : Expériences ATLAS et CMS

Le 22 avril, les expériences ont donc pu enregistrer les premières collisions stables de 2025, à une énergie encore limitée de 900 GeV (avec des faisceaux de protons à l’énergie d’extraction du SPS, sans accélération additionnelle du LHC). Ce sont des moments toujours intenses dans les différentes salles de contrôle. Si les procédures de démarrage sont désormais bien rodées, il faut néanmoins apprivoiser les nouveaux détecteurs installés pendant l'arrêt hivernal et s’adapter au vieillissement des matériels les plus anciens. La vigilance et la stricte application des procédures opérationnelles sont de mise.

La phrase de préparation du faisceau va se poursuivre encore quelques semaines. Les collisions à l’énergie nominale du faisceau (2 x 6,8 TeV) devraient se produire la première semaine de mai.  L'intensité du faisceau sera ensuite progressivement augmentée pour passer de quelques paquets de protons (contenant chacun 160 milliards de protons) à plus de 2300 entrant en collisions dans l’anneau.  Avant la fin mai, le LHC devrait donc être prêt pour cette nouvelle campagne de collisions proton-proton qui s’étendra alors jusqu’au 2 novembre avant de faire place aux faisceaux d’ions lourds jusqu'à l'arrêt hivernal début décembre.

La troisième phase d’exploitation (Run 3), qui a débuté en 2022, se terminera au milieu de l’année 2026. Avec une année 2024 exceptionnelle, les expériences ont plus ou moins chacune doublé leur quantité de données accumulée. 

Le nouveau champ d’investigation autour du boson de Higgs s’enrichit régulièrement, avec notamment la mesure de sa masse à une précision meilleure que le pour mille, la mesure certes moins précise mais inespérée de sa largeur, et une sensibilité accrue à ses couplages, et même bien meilleure qu’imaginée pour son auto-couplage. Plus récemment la mesure la plus précise de la masse du boson W ou encore l’observation d‘une nouvelle asymétrie entre matière et antimatière nourrissant les recherches sur la quasi absence d'antimatière dans l’Univers ont été publiées. Par ailleurs les études du plasma de quarks et gluons continuent à nous renseigner sur l’état de la matière dans l’univers primordial. Tout ceci n’est qu’un début car moins de 15% des données du programme LHC ont été prises !  Les équipes des laboratoires de l’IN2P3 (APC, CC-IN2P3, CPPM, IJCLab, IP2I, IPHC, L2IT, LAPP, LLR, LPCA, LPNHE, LPSC, Omega et Subatech) sont  à pied d’oeuvre pour faire de cette phase un succès tout en préparant activement les défis de la suivante. La phase dite haute-luminosité débutera en 2030, augmentant encore d’un facteur 5 le taux de collisions : pour suivre ce rythme effréné, de nombreuses jouvences d’ATLAS et CMS, en construction dans nos laboratoires notamment, seront installées entre 2027 et 2029.

Contact

Gaëlle Boudoul
Chercheuse dans l'expérience CMS (IP2I) et directrice de l'Antenne IN2P3 CERN Prévessin (AICP)
Laurent Vacavant
Directeur adjoint scientifique "Physique des particules" (CNRS Nucléaire & Particules)