Physique des particules : Zoom sur BELLE-II à l'aube du redémarrage de l'expérience

Début 2024, l’expérience de physique des particules BELLE-II à KEK au Japon va redémarrer après un an et demi d’arrêt technique. Cette pause a permis d’améliorer à la fois l’accélérateur SuperKEKB, qui produit les collisions électron-positron et le détecteur. L’analyse des données enregistrées depuis 2019 a donné lieu à de nombreux résultats présentés aux conférences d’été 2023, dont notamment un premier indice d’une transition rare du quark b, rendue possible par des conditions expérimentales uniques.

Des améliorations importantes

Après un arrêt technique d'un an et demi, l'expérience Belle II, située à Tsukuba au Japon, est prête à reprendre des données. Cette pause a permis d'apporter plusieurs améliorations à l'accélérateur SuperKEKb et au détecteur lui-même. Des blindages ont notamment été rajoutés à l’accélérateur afin de réduire le bruit de fond venant des faisceaux. La modification majeure a consisté à installer la deuxième couche du détecteur de vertex à pixel (partie centrale du détecteur), ce qui est important pour les mesures de violation CP dépendantes du temps qui permettent de caractériser les différences de comportement entre la matière et l'antimatière. D'ici décembre 2023, le détecteur sera peu à peu remis en route et prendra des données avec les particules venant du rayonnement cosmique. L'accélérateur redémarrera, quant à lui, début 2024 afin de produire des collisions jusqu'en juillet, avec l'objectif de battre le record mondial de luminosité instantanée qu'elle a précédemment obtenu à 4,7.1034 /cm2/s. 

Vue du détecteur de vertex pixel de BELLE-II, avant son insertion en 2023. Image : BELLE-II Collaboration

Premières analyses des données de BELLE-II

Durant cet arrêt technique, les physicien·nes de l'expérience ont analysé les données enregistrées entre 2019 et 2022, correspondant à une statistique de 424 fb-1, soit environ la moitié de l'échantillon de l'expérience précédente, Belle. De nombreux résultats ont été présentés aux conférences de l'été 2023, dont notamment un premier indice de la transition rare de quarks b se désintégrant en quark étrange et deux neutrinos (b → s ν anti-ν) en utilisant la désintégration du méson B+ en K+ ν anti-ν. Ces résultats, auxquels ont significativement contribué l’équipe de l’IPHC Strasbourg ont également été également présentés en séminaire au CERN le 7 novembre dernier. 

Cette désintégration est prédite avec une grande précision par le modèle standard de la physique des particules, à un taux de l’ordre de 5.10-6. Il s’agit donc d’une fréquence très faible mais qui représente avant tout un challenge d'un point de vue expérimental car la seule particule visible de l'état final est un kaon, difficilement différentiable de la multitude de kaons semblables produits couramment dans l’expérience dans les désintégrations des mésons beaux. Belle-II offre des conditions expérimentales uniques permettant la recherche d’un état final de ce type constitué d’une grande partie invisible, notamment du fait de l’excellente connaissance de l’énergie et de l’impulsion totales de la collision des leptons, permettant de contraindre cinématiquement la partie invisible. 

Mouvements dans la collaboration

Enfin, côté management, Karim Trabelsi, anciennement chercheur à IJClab et actuellement directeur du laboratoire de recherche international TYL, a pris la fonction de porte-parole de la collaboration Belle II en juin dernier pour un mandat de 2 ans. Au niveau de l'IN2P3, il est remplacé par Justine Serrano, chercheuse au CPPM, comme responsable scientifique du Master Projet Belle II.

L’expérience BELLE-II

BELLE-II est une expérience qui étudie les collisions électron-positron délivrées par le collisionneur SuperKEKB, situé à KEK au Japon, près de Tokyo depuis 2019. Son but : mettre en évidence des signes de nouvelle physique, non décrite par le modèle standard de la physique des particules par des mesures de très haute précision. Elle cherche par exemple l’existence des hypothétiques particules de matière noire ou bien des lepto-quarks qui expliqueraient les récentes anomalies observées dans les désintégrations des mésons B. Trois laboratoires de l’IN2P3, le Centre de Physique des Particules de Marseille, l’Institut pluridisciplinaire Hubert Curien à Strasbourg et le Laboratoire de physique des deux infinis Irène Joliot-Curie à Orsay et le Centre de Calcul de l’IN2P3 à Lyon sont actuellement impliqués sur cette expérience.

Pour en savoir plus

Contact

Justine Serrano
Chercheuse en physique des particules au CPPM (Marseille)
Isabelle Ripp-Baudot
Chercheuse en physique des particules à l'IPHC (Strasbourg)
Laurent Vacavant
Directeur adjoint scientifique "Particules et Hadronique" (IN2P3)
Perrine Royole-Degieux
Chargée de communication (IN2P3)