Une avancée majeure pour la production de positrons polarisés
Une équipe franco-américaine incluant des chercheurs du CNRS et du Jefferson Laboratory (JLab) a mis au point une nouvelle technique prometteuse pour la production de positrons polarisés. Le démonstrateur Polarized electrons for polarized positrons (PEPPo) allie efficacité, faible coût et absence de radioactivité résiduelle, trois atouts de taille. Cette expérience réussie, qui ouvre la voie à l'utilisation des faisceaux de positrons dans de nombreux domaines, a fait l'objet d'une publication dans Physical Review Letters en mai 2016.
Les faisceaux polarisés de positrons 1
sont des éléments essentiels des programmes expérimentaux de la prochaine génération d'accélérateurs de leptons. Ils sont des outils complémentaires, parfois indispensables, pour percer les secrets de la structure du nucléon. Leur production reste cependant complexe et coûteuse, notamment en raison de la grande quantité d'énergie nécessaire – engendrant comme effet secondaire une radioactivité résiduelle à proximité des lignes de faisceau.
Une équipe issue de plusieurs laboratoires de l'IN2P3, en collaboration avec le JLab, explore actuellement une méthode innovante pour la production de positrons polarisés à partir de faisceaux polarisés d'électrons de faible énergie (inférieure à 10 MeV contre plusieurs milliers de MeV utilisés habituellement).
En 2012, l'expérience de démonstration PEPPo, réalisée dans l'injecteur de l'accélérateur du JLab, a produit avec succès des taux de polarisation élevés (82%) limités uniquement par la polarisation du faisceau initial d'électrons. Les chercheurs ont ainsi démontré que la polarisation des électrons peut se communiquer aux positrons produits dans des cibles d'épaisseur suffisante avec une efficacité proche de 100%.
Des applications très variées à l'horizon
Jusque-là réservés aux grands accélérateurs de particules, les faisceaux polarisés de positrons pourraient, grâce à PEPPo, devenir accessibles à des domaines scientifiques et techniques très variés : de la recherche à l'industrie et de la physique des hautes énergies à la physique de la matière condensée. Ils pourraient par exemple être utilisés dans l'analyse des propriétés magnétiques des matériaux. La méthode PEPPo ouvre aussi de nouvelles perspectives de recherche dans l'étude de la structure des hadrons auprès des accélérateurs de particules. En ce sens, le prochain défi technique est de développer des faisceaux d'intensité suffisante pour les futures machines telle que l'International Linear Collider (ILC).
Cette expérience a été financée par l’U.S. Department of Energy (DOE), le CNRS et le projet ILC. Ce sont notamment les équipes du Laboratoire de physique subatomique et cosmologie, avec celles de JLab, qui ont assuré le développement du détecteur, son installation et la première prise de données des positrons polarisés.
Laboratoires français impliqués dans le projet :
- Institut de physique nucléaire d'Orsay (IPNO, CNRS/Université Paris Sud)
- Laboratoire de l’accélérateur linéaire (LAL, CNRS/Université Paris Sud)
- Laboratoire de physique subatomique et cosmologie (LPSC, CNRS/Université Grenoble Alpes)
Référence bibliographique
D. Abbott et al. (PEPPo Collaboration), "Production of Highly Polarized Positrons Using Polarized Electrons at MeV Energies", Physical Review Letters 116, 214801, 27 mai 2016
Pour en savoir plus
- Site de l’IPNO
- Site du JLab (en anglais)
- Site de l’American Physical Society (en anglais)
- Le physicien Joe Grames (JLab) parle de PEPPo (en anglais)
- 1Le positron (e+) est l'antiparticule de l'électron (e-). Il a une charge électrique positive (à l'opposé de l'électron qui, lui, a une charge électrique négative). Dans les accélérateurs de particules, on produit habituellement des positrons à partir d'un faisceau d'électrons.