Nicolas Arnaud : « Faire de la médiation scientifique est encore plus nécessaire aujourd’hui, alors qu’il devient difficile de démêler le vrai du faux »

Entretien Médiation scientifique

Nicolas Arnaud est chercheur à IJCLab et chargé de mission médiation et éducation à l’IN2P3. Alors que l'année de physique bât son plein et mobilise tous azimuts le CNRS et ses partenaires de l'enseignement supérieur et de la recherche, il nous présente les multiples facettes et enjeux de la médiation scientifique en physique des deux infinis, déclinée en de nombreuses actions à l’IN2P3. Un métier de contact et d’échanges au service de la science.

En quoi consiste la fonction de chargé de mission médiation et éducation ?

Il s’agit en premier lieu de coordonner des actions de médiation scientifique ou éducatives globales, qui ont du sens à l’échelle de l’Institut. Elles portent sur un thème scientifique suffisamment large pour “représenter” l’IN2P3, elles ont le potentiel d’être organisées sur l’ensemble du territoire, ou encore elles nécessitent des compétences multiples que l’on trouve au sein du réseau de nos laboratoires. Ces actions doivent être menées dans le respect des initiatives locales – une équipe, un domaine scientifique, un labo, une expérience, par exemple le musée Sciences ACO à Orsay – qui poursuivent les mêmes buts et qu’il faut essayer d’accompagner, ou au moins de faire connaître. Une autre dimension à laquelle je n’aurais pas pensé au début mais qui s’impose de plus en plus à mesure que les années passent, est un rôle de facilitateur et de dépositaire d’une forme de “mémoire” du domaine : savoir vers qui diriger quelqu’un qui vous sollicite, renvoyer vers des ressources antérieures, s’appuyer sur ou transformer l’existant pour bâtir un nouveau projet, etc.

Pourquoi l’IN2P3 met-il en œuvre des actions de médiation-éducation ?

Parce que cela fait partie des missions du CNRS et de ses personnels ! Plus prosaïquement parce que c’est important d’expliquer et de partager nos recherches : quels sont leurs enjeux, comment les menons-nous et avec quelles technologies, pour quels résultats et quelles retombées sociétales. Et c’est encore plus important – je dirais même nécessaire – aujourd’hui, alors que l’accès à l’information n’a jamais été aussi direct mais où il devient difficile de démêler le vrai du faux.

Qu’est-ce qui déclenche les opérations de médiation-éducation ?

Une nouvelle action naît d’une envie, d’un besoin ou d’une opportunité. Elle peut être unique, mais ma préférence va aux initiatives qui s’inscrivent dans la durée ou qui sont récurrentes : j’aime beaucoup pérenniser quelque chose dont la mise en place a demandé du temps, des efforts et des ressources. En tout état de cause, il ne faut pas hésiter à faire remonter des idées depuis les expériences, les laboratoires ou des équipes – de recherche ou plus techniques. Au minimum, on pourra en discuter et donner des conseils ; et, si l’initiative prend et fédère, pourquoi ne pas la transformer en une action IN2P3 à part entière !

Quelles sont les cibles visées par ces actions?

Vu que l’IN2P3 participe pleinement à l’enseignement supérieur via l’ensemble de ses unités mixtes et ses liens avec les universités et les grandes écoles, je vois nos actions de “médiation-éducation” comme complémentaires de ces efforts. Elles sont tournées vers le grand public et ciblent plus particulièrement les élèves et professeurs du secondaire, ces derniers étant de vrais “facteurs multiplicatifs” dans la transmission des connaissances.

Pouvez-vous nous citer quelques actions phares conduites par l’IN2P3 ?

Je voudrais rappeler en premier lieu les actions récurrentes qui existent depuis une quinzaine d’années maintenant et qui ont pour certaines débuté sous l’impulsion de mes prédécesseurs – en particulier le regretté Alain de Bellefon. Le “French Teacher Programme”, organisé conjointement par l’IN2P3, le CERN et le dispositif ministériel “Sciences à l’École” est l’une de ces actions de longue haleine. Il nous permet d’inviter et de former des dizaines d’enseignants du secondaire chaque année in situ au CERN. Mais il y a aussi les “Masterclasses internationales” qui permettent chaque année à des centaines de lycéens invités dans nos laboratoires de devenir des chercheurs d’un jour en analysant de vraies données sur ordinateur. À ces deux programmes récurrents portés par le CERN se greffent aussi d’autres actions coordonnées par l’IN2P3 et ses partenaires au niveau national. Je pense notamment à la série des “Nuits de la physique”, ces soirées scientifiques organisées simultanément dans plusieurs villes françaises autour de thèmes propres à chaque édition, mais aussi à la publication des “Affiches des composants élémentaires de la matière”, des trois éditions du livre “Passeport pour les deux infinis”, ou encore à la gestion du site “laradioactivite.com”, qui propose une information scientifique – et donc dépassionnée – sur un sujet transverse qui va de la recherche fondamentale à la société. Pour ne citer que celles-là.

Pouvez-vous nous en dire plus sur le stage des Profs au CERN ?

Les enseignants, des professeurs de sciences du secondaire, sont sélectionnés au printemps à l’occasion d’un appel à candidature relayé sur l’ensemble des académies par Science à l’école. Ils sont ensuite accueillis pendant cinq jours au CERN pendant la première semaine des vacances de la Toussaint. Là, ils assistent à un programme de conférences données par des scientifiques de l’IN2P3 et du CERN, entrecoupé de visites d’expériences et de travaux pratiques. L’idée est qu’ils repartent dans leurs établissements avec des connaissances renouvelées en physique des deux infinis et des outils pour l’enseigner. Ils apprennent par exemple à fabriquer une chambre à brouillard « maison ». En moyenne, nous finançons 25 stagiaires par édition avec nos partenaires. Mais cette année, à l’occasion de l’année scolaire de la physique 2023-2024, nous avons pu envoyer au CERN 45 enseignants et enseignantes, qui comme d’habitude en sont repartis ravis.

Ces stages ont du succès ?

Sans aucun doute. Chaque année nous devons refuser des candidatures. Depuis que le CERN a créé ces formations, plus de 15 000 enseignants d’une quarantaine de pays différents se sont succédés sur place. Et, en ce qui concerne la France, ce sont plus de 400 enseignants qui ont bénéficié du programme depuis 2008 -- et près d’une centaine en distanciel pendant la pandémie quand les stages en présentiel étaient impossibles. Le film que nous avons réalisé à l’occasion de la dernière édition et que je vous invite à regarder sur la chaîne Youtube EDDL du CNRS reflète bien l’ambiance « sérieuse et décontractée » dans laquelle se déroulent ces stages.

Le CERN a visiblement un rôle moteur très important ?

Le CERN attache en effet une grande importance à tout ce qui touche à la médiation et à l’éducation. Il y consacre beaucoup de moyens à travers les programmes internationaux qu’il promeut ou au travers du tout nouveau musée qu’il a inauguré à l’automne dernier, le Science Gateway. Il existe aussi un groupe du CERN spécialisé dans les sciences de l’éducation et qui fait de la recherche dans ce domaine (voir par exemple le “Teacher and Student Forum” dont les réunions sont semestrielles) tout en organisant des activités pour tous les types de public. C’est aussi le CERN qui a joué un rôle moteur dans la création de ce qui est maintenant la Collaboration IPPOG (“International Particle Physics Outreach Group”) qui a fêté ses 25 ans à l’automne 2022. Un forum unique où pays, expériences et grands laboratoires peuvent discuter de médiation scientifique, échanger sur les bonnes pratiques et trouver des idées pour de futures actions en s’inspirant de celles présentées par les collègues. IPPOG est par exemple à l’origine des Masterclasses Internationales.

Sciences à l’école fête ses 20 ans cette année. Comment ce dispositif s’insère-t-il dans les actions de l’IN2P3 ?

Sciences à l’École et l’IN2P3 sont complémentaires : l’un est un dispositif ministériel, relais naturel vers l’Éducation Nationale et ses enseignants, l’autre participe aux progrès de la connaissance et à la diffusion du savoir. Ensemble, nous proposons donc des formations sans équivalent que les professeurs utilisent pour améliorer leurs connaissances dans nos thématiques. Notre partenariat est presque aussi ancien que ce dispositif ministériel : en plus de l’organisation conjointe du programme des professeurs au CERN, il s’est concrétisé avec le plan d’équipements “Cosmos à l’École” qui gère un parc d’une cinquantaine de détecteurs pédagogiques de muons cosmiques, construits au CPPM. Ces “cosmodétecteurs” sont prêtés aux lycées qui en font la demande et dont les professeurs ont été formés au préalable – notamment via le programme “Profs au CERN”. Sciences à l’École pilote plusieurs plans d’équipements similaires au nôtre, dans des domaines scientifiques divers : l’astronomie, la sismologie, etc. Il organise également des concours nationaux pour élèves de tous les niveaux et coordonne la participation française à plusieurs Olympiades Internationales – dont celles de physique.

Avez-vous de nouveaux projets en développement ?

Un bon exemple de projet en cours de construction est la formation « profs au GANIL » pour enseignants du secondaire en sciences. Le GANIL est en effet une infrastructure de recherche de choix pour organiser un stage similaire à celui du CERN et nous avons pu profiter de l’élan apporté par l’année scolaire de la physique 2023-2024 pour le concrétiser. Le GANIL a contacté Sciences à l’École, rassemblé une équipe locale motivée et préparé un beau programme qui exploite également les synergies locales entre laboratoires – le LPC Caen bien entendu, mais aussi au-delà. La première édition de ce nouveau stage aura lieu fin août : j’espère qu’elle sera suivie de nombreuses autres !

Comment conciliez-vous l’aspect éducation-médiation avec votre travail de chercheur ?

J’ai toujours pensé ces activités – travail de recherche d’un côté, médiation / éducation de l’autre – comme complémentaires et nécessaires à mon épanouissement professionnel. Donc j’essaye de dégager du temps pour chacune en leur donnant un poids variable au cours du temps en fonction de mon agenda et des échéances à venir, à court comme à moyen/long terme. Et tout en gardant en tête mes priorités : je fais de la médiation scientifique, mais je suis d’abord un chercheur IN2P3. Bien sûr, réussir à concilier les deux demande du temps et donc de faire des choix, tant professionnels que personnels … Quand je travaille sur un aspect je n’avance pas sur l’autre, et vice versa. Donc je pourrais probablement aller plus loin dans l’un ou l’autre de ces domaines si j’étais plus « spécialisé », mais chaque fois que la question s’est posée j’ai toujours conclu que j’avais besoin des deux pour mon équilibre. Au final, la sensation d’avoir réussi à faire passer un message, d’avoir fait comprendre quelque chose à son auditoire, qu’il s’agisse d’élèves, d’enseignants ou du grand public, vaut largement le temps passé à faire de la médiation ou des actions éducatives. En tout cas, je ne m’en lasse pas !

« Des profs au CERN » une vidéo sur l'action éducative phare de l'IN2P3

Chaque année depuis 2008, l’Institut national de physique nucléaire et de physique des particules du CNRS (IN2P3) et Sciences à l’École organisent, en partenariat avec le CERN, un stage de formation de cinq jours pour enseignant·es en physique du secondaire. D’un côté l’infiniment petit (constituants élémentaires de la matière, interactions fondamentales, noyaux atomiques) ; de l’autre l’infiniment grand (astroparticules et cosmologie), ce stage combine cours d’introduction, conférences thématiques, activités pédagogiques et, bien sûr, des visites d’installation du CERN – où le stage se déroule. Les disciplines associées issues des sciences de l’ingénieur et de la technologie sont également abordées : instrumentation et détecteurs, accélérateurs, informatique, retombées sociétales et applications, etc. L’appel à candidatures est ouvert au printemps ; il est diffusé sur le site de Sciences à l’École et relayé dans les académies par les correspondants académiques. Entre 20 et 25 professeurs sont sélectionnés chaque année ; certaines années, comme pour l’édition 2023 qui a eu lieu pendant l’année scolaire de la physique 2023-2024, la promotion du stage est agrandie. Les critères de sélection mettent l’accent sur la motivation du candidat ou de la candidate et sur ses projets pédagogiques, actuels ou futurs, en lien avec la thématique de cette formation. Chaque année, le CERN co-organise une quarantaine de programmes nationaux comme celui des professeur·es français. Ils ont chacun lieu dans la langue du pays organisateur. En plus, le CERN organise pendant l’été deux programmes internationaux en anglais pour enseignants du secondaire. La France, état membre fondateur du CERN, peut prétendre à plusieurs places pour ces programmes internationaux, en fonction de la qualité et de la quantité des candidatures reçues. En savoir plus : https://anneedelaphysique.cnrs.fr/esp... Lien pour candidater : https://teacher-programmes.web.cern.c... Un film CNRS/IN2P3 Réalisation : Laurent Orluc Images : Olivier Besson Montage et finitions : François Lerch L'IN2P3 et Sciences à l'École remercient le CERN pour son soutien et l'accueil apportés au programme des professeur·es français·es depuis 2008. Ces stages ne pourraient pas avoir lieu sans le travail préparatoire essentiel effectué par le service communication et les services adminstratifs centraux de l'IN2P3. Merci à tous les agents impliqués dans cette aventure depuis quinze ans. #AnnéePhysique #MédiationScientifique #Éducation #Professeur #Science #Physique

Audiodescription

Transcription
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Voici le plus grand centre de physique des particules du monde, le CERN, à cheval
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entre la France et la Suisse, près de Genève.
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Les chercheurs du monde entier viennent y étudier l'infiniment petit,
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tentent de comprendre de quoi la matière est composée, de découvrir
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de nouvelles particules et quelles sont les lois qui régissent l'Univers.
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C'est ici qu'a été découvert le fameux boson de Higgs
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en 2012, graal des physiciens, et qui a valu un prix Nobel
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l'année suivante à Peter Higgs et François Englert.
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C'est ici aussi qu’a été fondé le web, le réseau Internet
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que nous utilisons tous.
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Et c'est dans ce lieu d'excellence mondiale
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qu'est organisé depuis quinze ans un stage unique d'une semaine
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pour les professeurs de sciences de l'Éducation nationale.
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Un stage en immersion complète de formation
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à la physique des particules pour des professeurs très demandeurs
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venant de toute la France, y compris des outre-mer.
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L'ambiance, pendant cette semaine, est extraordinaire
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parce que les profs sont très intéressés et motivés.
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Et nous, bien sûr, nous sommes très heureux
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d'avoir beaucoup de profs au CERN.
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- Soyez gentils, c'est le seul moment où je vais être un petit peu
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un petit peu gnangan, mais essayez de respecter vraiment les horaires.
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Avec une vingtaine d'intervenants, une demi douzaine de visites
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d'installations, une quinzaine de cours et de conférences thématiques
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et une véritable séance de travaux pratiques, le programme est dense.
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Un programme organisé et concocté par le chercheur Nicolas Arnaud,
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qui est aux manettes de cette formation depuis 2012
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et qui a vu passer plusieurs centaines de professeurs stagiaires.
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On ne doit pas être loin maintenant d'environ 400 professeurs
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qui ont participé au programme depuis ses débuts.
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Et cette année, en fait,
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on a une promotion plutôt plus importante que les autres années.
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Parce que 2023-2024, c'est l'année scolaire de la physique en France.
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Donc, pour
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célébrer cet événement
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important au niveau Éducation nationale,
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on a doublé la promotion et donc cette année on a environ 45 professeurs
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qui participent à l'édition 2023 du programme des professeurs au CERN.
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On pourrait imaginer que l'ambiance est assez académique,
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mais on essaye de faire quelque chose de beaucoup
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plus ludique et beaucoup plus intéressant.
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Les profs
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viennent sur leur temps de vacances.
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Là, c'est la première semaine des vacances de la Toussaint, donc on essaye d'avoir
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une ambiance décontractée
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mais en même temps une sorte de rigueur scientifique
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et donc l'emploi du temps est assez dense.
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Donc je pense qu'ils seront contents vendredi quand ça se terminera.
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Ils auront fait une vraie
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semaine de travail.
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Avant de démarrer cette vraie semaine de travail,
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les 45 professeurs attendent de ce stage plusieurs choses.
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- Je suis là pour approfondir mes connaissances,
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trouver des idées de ressources.
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L'objectif, c'est aussi de développer des projets à côté au lycée
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pour motiver les élèves à étudier ces domaines et à développer
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leur intérêt dans ces filières-là.
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Parfaire mes connaissances en physique des particules parce que j'en avais fait
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un petit peu dans mes études, mais ça n’a pas vraiment été mon domaine spécifique.
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Donc là, je suis content.
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Déjà ce matin on a fait bon passage en revue.
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Et puis on a appris des choses.
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Et puis surtout, on a des intervenants de très grande qualité
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donc on va pouvoir poser plein de questions
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et apprendre plein de choses.
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Donc ça, c'est vraiment super. Et puis après,
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repartir avec de nouvelles idées d'activités pédagogiques pour les élèves.
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J'attends un socle de connaissances un peu plus important
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en physique des particules, pour pouvoir être un peu à l'aise
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quand je discute avec les collègues et être un peu moins perdue.
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Pour les visites,
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bon apparemment le CERN est encore en activité,
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donc on ne pourra pas rentrer dans l'accélérateur vraiment.
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Mais les visites, c'est toujours très intéressant.
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En attendant les premières visites des installations du CERN,
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les professeurs démarrent leur semaine de stage par des cours et des conférences.
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L'une d'elles présente aux professeurs différents types d'outils pédagogiques
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d'enseignement de la physique à l'école.
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Des outils dont ils pourront se servir pendant les années scolaires à venir.
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- Alors j'ai commencé par leur présenter qui nous sommes : “Sciences à l'École”.
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C'est à dire que nous sommes un dispositif ministériel
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qui a été fondé en 2004 et nous avons deux grands types d'actions.
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La première action, c'est ce qu'on appelle les plans
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d'équipement, c'est à dire que nous avons du matériel scientifique
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que nous mettons à disposition des établissements
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qui en font la demande, des collèges, des lycées, pour permettre de réaliser
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des séances de travaux pratiques, des activités avec leurs élèves.
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Et le deuxième volet de nos actions
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concerne quatre concours nationaux et internationaux.
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Le concours CGénial, et également la participation française
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à trois olympiades internationales : les Olympiades internationales
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de chimie, celles de physique et celles de géosciences.
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Et puis, très vite, Romain Madar, physicien au CNRS, emmène les stagiaires
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dans une plongée au cœur de la physique des particules et des interactions en jeu
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dans l'infiniment petit.
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- Je pense que le truc qui est important, c'est de partir de ce qu'ils connaissent
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pour les emmener graduellement à ce qu'il faut leur donner comme message,
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à ce qu'il faut leur délivrer et vérifier un petit peu le long du chemin
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que chaque étape est à peu près comprise et qu'il n'y a pas vraiment de points
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bloquants qui empêcheraient la compréhension du message final.
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Et parfois, on revient un petit peu sur nos pas et on réexplique.
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Ça fait partie un petit peu du challenge, mais c'est aussi ça qui est intéressant
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en tant qu’intervenant
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de trouver la bonne explication qui permet de le faire comprendre.
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Et souvent, ça nous force nous-mêmes à comprendre des trucs
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qu'on n'aurait pas forcément identifiés sans ça.
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Moi, ma motivation, c'est qu'ils soient contents
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et qu’ils sortent de la session en ayant appris des choses
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et ensuite évidemment la finalité c'est
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quand même qu'ils puissent exploiter ça dans leur milieu professionnel
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et le transmettre ensuite aux élèves.
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Et je pense que si les professeurs qui viennent ici
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ont plaisir à nous
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écouter en tant qu'intervenant,
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naturellement, ils vont transmettre ces mêmes informations.
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Donc mon but premier, moi, c'est qu'ils sortent en étant contents de pouvoir
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avoir accès à cette information là et qu'ils aient retenu des choses.
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La dimension de plaisir est importante.
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Ce n'est évidemment pas la seule conférence.
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Celle qui suit, du physicien Simone Gilardoni, doit permettre aux enseignants
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de commencer à se familiariser avec les différents accélérateurs du CERN,
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leur fonctionnement, du synchrotron au LHC,
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le Large Hadron Collider, le plus grand collisionneur au monde.
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- Ce programme est très important parce que
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les professeurs, ce sont eux qui forment
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les futurs chercheurs.
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Et donc, mis à part le fait que c'est important de leur expliquer
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ce qu'on fait au CERN,
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c'est aussi important pour moi de construire avec eux les outils
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pour former les générations futures des gens qui vont venir ici.
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Je pense qu'il faut voir les choses en vrai, dans le sens que
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ce sont les concepts et la
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technologie qu'on développe ici que l’on cherche à expliquer.
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Les voir sur place, c'est assez différent que d’en parler par Zoom
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ou bien par vidéoconférence, ça devient tout de suite
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plus facile à comprendre quand on voit de quoi on parle.
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Et pour voir de quoi on parle, le CERN a préparé
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pas moins de six visites d'installations pendant la semaine de stage.
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De quoi voir les choses en vrai et en grand.
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- Le détecteur ATLAS mesure 45 mètres de longueur,
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25 mètres de hauteur et pèse 7000 tonnes,
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comme la tour Eiffel.
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J’aime bien l'interaction avec des gens qui s'intéressent, leurs questions
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et aussi
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leur intérêt à apprendre
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plus de choses par rapport à nos sciences.
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Il y a toujours une interaction
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entre moi et le public.
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Leurs questions me guident :
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plus de questions, plus de réponses, plus de connaissances.
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Alors je m'adapte chaque fois aux intérêts de chaque groupe.
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Bien sûr avec les enseignants, il y a beaucoup de questions
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beaucoup plus spécifiques et plus profondes.
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Avec ces visites,
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les professeurs voient la réalité de la recherche au jour le jour.
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Ici, devant la salle de contrôle du détecteur ATLAS,
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l'un des quatre grands détecteurs qui étudient les collisions de particules
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au LHC où une expérience réelle est en cours.
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- Il faut qu’on s'assure que les données
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sont bien enregistrées et sont de bonne qualité.
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Entre deux visites d'instruments, les stagiaires approfondissent leurs
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connaissances à travers le visionnage d'un film sur la physique des particules
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et la visite d'expositions.
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Ces visites et les conférences permettent aux professeurs de bien consolider
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leurs bases en physique des particules.
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Mais l'enseignement de la
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physique n'est pas que théorie ou calcul,
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il passe aussi par de l'expérimentation, des manips,
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que les enseignants peuvent faire avec leurs élèves.
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Et là encore, les attentes des enseignants sont énormes.
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- La partie expérimentale construire un détecteur,
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construire une chambre à brouillard,
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ça, c'est quelque chose qui nous intéresse vraiment
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parce que nous construire une chambre à brouillard
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ça fait trois ans qu'on essaye et ça ne marche pas très bien.
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Donc là, si on a des conseils d'experts
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qui ont l'habitude de faire cet atelier de formation régulièrement, il y a des chances
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qu'on fasse fonctionner la nôtre et ça, les élèves, ils vont adorer.
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- Moi, j’aimerais bien faire une chambre à brouillard aussi
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parce qu'on a des détecteurs de muons au lycée.
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Mais c'est juste des données et des statistiques
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à traiter et pour les élèves ce n'est pas très visuel.
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Donc j'aimerais bien arriver
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à faire une chambre à brouillard avec eux pour qu'ils puissent visualiser
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des particules cosmiques, quelque chose d'un peu magique pour eux.
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Les organisateurs du stage ont donc prévu la réalisation
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d'une vraie expérience : la fabrication d'une chambre à brouillard
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qui permet de détecter des particules subatomiques
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comme des protons ou des électrons par exemple.
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Une expérience simple
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que les professeurs de physique de lycée peuvent reproduire en classe.
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Pour réussir à détecter ces particules, il faut suivre une procédure bien précise :
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de la carboglace, une chambre
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hermétiquement fermée, de l'alcool,
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et l'expérience se met en place.
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Étape par étape, les professeurs en stage
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apprennent ici dans la joie et la bonne humeur d’une salle de classe
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comment réaliser ce détecteur avec leurs élèves.
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Si l'expérience
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nécessite un matériel accessible aux classes de lycée,
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elle implique de suivre rigoureusement le mode d'emploi.
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Après 1 h de mise en place et dans la pénombre,
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la magie peut enfin opérer.
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Dans le gaz refroidi, certaines des milliards de particules qui nous entourent
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vont laisser une empreinte éphémère dans la chambre à brouillard.
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Ce n'est pas la particule qui est vue, mais la trace qu'elle laisse
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en interagissant avec le gaz.
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- Si là, il y a eu une espèce de petit rond... - Des petites traces...
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- Oui, oui - Il y a la vapeur qui recondense
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- Des espèce de petits trucs qui se créent...
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Et après une bonne heure de ces travaux pratiques, vient l'heure
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du retour et de l'échange avec Charlotte, la chercheuse qui encadre le groupe.
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Un moment important qui permettra aux professeurs de peaufiner
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leurs connaissances
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pour mettre en place cette expérience de retour dans leur classe,
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et surtout donner envie aux élèves de s'intéresser à la physique des particules.
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Car tout le but est là : donner envie aux générations futures
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de se lancer dans ces disciplines.
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Car loin d'être de la pure et simple recherche fondamentale,
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la physique des particules a des retombées sur nos vies.
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C'est ce que veut montrer le physicien Paul Lecoq,
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spécialiste de physique des particules au CERN et d'imagerie médicale,
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avec une myriade d'applications dans le domaine de la santé.
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Ovationné à la fin de sa conférence, le chercheur a toujours fait
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le lien entre physique des particules et recherche médicale.
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- L'imagerie médicale a toujours bénéficié
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de l'apport extrêmement important de la physique.
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Et je dirais que cela continue actuellement, toutes les technologies
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complexes que l'on développe pour nos détecteurs au LHC
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peuvent être utilisées
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pour améliorer les performances de l'imagerie médicale qui est un domaine
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en pleine expansion et surtout, pour répondre à de nouveaux défis
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de la médecine qui sont la médecine personnalisée,
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qui sont les maladies neurodégénératives, le cancer, etc.
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C'est très important de faire passer ce message
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aux gens qui sont chargés de transmettre ce message à la société.
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Les professeurs, évidemment, sont en première ligne.
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Le fait de montrer que tout ce qu'on a fait,
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ce n'est pas uniquement théorique,
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virtuel et réservé à quelques spécialistes,
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mais que ça a un impact sur l'ensemble
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de la société, pour moi, c'est quelque chose d'extrêmement important.
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Et puis, une autre chose qui m'anime aussi
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dans le cadre d'événements
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comme celui qui a eu lieu aujourd'hui avec ces professeurs,
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c'est précisément d'activer les liens de transmission
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vers le public et vers les jeunes générations.
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Le jour où les jeunes seront éduqués dans ce sens là fortement,
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je pense que ce sera un contre-pouvoir formidable
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à toutes les bêtises
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qu'on entend et qu'on voit passer dans beaucoup de médias aujourd'hui.
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Le besoin que l'on a, c'est de développer
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non pas l'envie de croire, mais l'envie de comprendre.
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Besoin de comprendre, les professeurs en ont toujours l'envie.
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Après ces cinq jours de stage, ils ont droit à une dernière visite.
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Le détecteur CMS sur le LHC, le Large Hadron Collider,
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l'une des plus grandes expériences de physique fondamentale du monde.
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Et pour cela, il faut descendre à 100 mètres
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sous terre pour voir la caverne de service.
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L'installation frappe par son gigantisme, cette taille absolument hors norme.
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Et la physicienne Gaëlle Boudoul fait visiter son domaine
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et partager avec enthousiasme ses recherches.
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- Là, c'est chez moi, donc on est sur le site de l'expérience
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CMS et donc c'est vraiment un lieu qui est magique
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parce qu'on a le détecteur sous nos pieds à 100 mètres sous terre,
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on a le hall d'assemblage tout autour de nous
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et on a la salle de contrôle pas loin qui pilote donc ce super détecteur.
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Bien sûr, ici moi ça fait plus de quinze ans que je travaille
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sur ce détecteur, donc je l'ai vu évoluer au fil des années.
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On l'améliore toujours.
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Et puis on fait tellement de belle physique
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avec ce détecteur qu'on ne peut être que passionnée d'être ici.
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La promo de cette année est exceptionnelle.
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Un cru très très bon
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donc ils sont vraiment super contents déjà d'être là et ça nous fait plaisir.
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Nous on est contents de leur montrer nos installations et ils étaient très intéressés
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et je pense que du coup, ils vont ramener plein de messages très positifs
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dans leur classe et c'est ça qui est bien, c'est parfait même.
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Et pour conclure cette semaine de stage, les organisateurs ont tout prévu
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du restaurant,
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suisse comme il se doit, avec l'ambiance qui va avec,
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jusqu'à la remise des diplômes
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dans une atmosphère surchauffée, un peu comme dans
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une salle de classe.

Contact

Nicolas Arnaud
Chargé de mission médiation et éducation
Emmanuel Jullien
Responsable du service communication de l'IN2P3