Photo de groupe de la collaboration LHCb prise le 30 mars 2022 pendant la pause pour maintenance. Crédits : M. Brice, J. M. Ordan, P. Traczyk © 2022 CERN

La collection hiver 2022 des résultats de l’expérience LHCb du CERN

Résultats scientifiques Physique des particules

Alors qu’elle vient de célébrer la parution de sa 600ème publication[1] en novembre 2021 et que la campagne de prise de données auprès du LHC va reprendre ce printemps avec un détecteur pratiquement tout nouveau, la collaboration LHCb a rendu public de nombreux nouveaux résultats[2] lors des « conférences de l’hiver 2022 ». L’occasion de faire le point sur la physique explorée par les scientifiques de la collaboration.

Les mesures de LHCb embrassent des domaines très vastes et variés. Ces analyses permettent de tester le Modèle Standard (MS) avec une grande précision et ainsi de le pousser dans ses retranchements. En effet, bien que le MS décrive très bien « l’infiniment petit » (les particules élémentaires et leurs interactions fondamentales) et que ses prédictions aient toujours été confirmées par l’expérience depuis plus de 40 ans, nous savons qu’il doit exister une théorie plus générale. Cette dernière engloberait le MS tout en allant au-delà : elle devrait être en accord avec ce dernier partout où il fonctionne, mais sa validité devrait s’étendre à des situations que le MS peine à décrire ou pour lesquelles il donne des réponses en désaccord avec les mesures expérimentales.

Le problème est que l’on ne sait pas bien ce que cette nouvelle théorie au-delà du MS pourrait être et que l’on cherche encore des cas où le MS serait mis en défaut de manière flagrante. C’est pour cela que des expériences comme LHCb cherchent tous azimuts à faire « craquer » le MS, par des mesures de précision ou en cherchant des contradictions ou des différences dans un ensemble de résultats étudiés de manière globale. C’est ce que l’on appelle de manière générique la « recherche indirecte de la nouvelle physique ».

Photo de groupe de la collaboration LHCb au CERN.
Photo de groupe de la collaboration LHCb prise le 30 mars 2022 pendant la pause pour maintenance. Crédits : M. Brice, J. M. Ordan, P. Traczyk © 2022 CERN

En premier lieu, LHCb explore la physique de la symétrie CP et de la métrologie CKM[3], dans les désintégrations des hadrons beaux et charmés (contenant respectivement un quark b et un quark c). Parmi les sujets qui attirent fortement l’attention de la communauté de la physique des particules depuis quelques années, il y a bien évidemment les tests de l’universalité du couplage aux leptons[4], c’est-à-dire le fait que, dans le cadre du MS, les trois types de leptons (électrons, muons et leptons tau) doivent interagir de la même manière avec les autres particules – une fois leurs différences de masse prises en compte.

Également, dans ce même cadre de mise en évidence d’effets au-delà du MS, la collaboration LHCb fournit de façon régulière des mesures sur les désintégrations radiatives et très rares[5], que des effets de nouvelle physique pourraient rendre plus fréquentes qu’attendu avec le MS. Ainsi, les données de LHCb révèlent des anomalies qui interpellent la communauté des théoriciens[6]. Il s’agit de comprendre si les différences observées sont dues à des imperfections du côté des mesures ou du côté des calculs théoriques ou bien si elles sont réelles, ce qui voudrait dire qu’on a enfin trouvé une manifestation de la nouvelle physique.

La collaboration LHCb développe aussi un programme de recherche autour de la physique des bosons W (mesure de la masse) et Z à haute rapidité, de celle des ions lourds[7], de la spectroscopie des baryons beaux et charmés et de la découverte de nombreuses résonances exotiques (tetraquarks et pentaquarks, nouveaux états charmonium et baryons doublement charmés)[8].

Références

  1. LHCb collaboration et. al., « Searches for rare B0s and B0 decays into four muons », JHEP 03 (2022) 109.
  2. Page des publications du LHCb.
  3. « CKM Quark-Mixing Matrix » (PDF) revue en mars 2020 par A. Ceccucci (CERN), Z. Ligeti (LBNL) and Y. Sakai (KEK), Particle Data Group, Prog. Theor. Exp. Phys. 2020, 083C01 (2020).
  4. F. Polci, LPNHE, Moriond QCD22.
  5. M. Fontana, LPNHE, Moriond EW22.
  6. D. Becirevic, IJCLab, Moriond EW22.
  7. E. Maurice & B. Audurier, LLR, Quark Matter22.
  8. 55 nouveaux hadrons ont été découverts par LHCb : article sur le site du CERN.

Publications

Les collaborateurs des équipes IN2P3 de LHCb sont impliqués dans ces travaux de recherche, souvent comme auteurs principaux des analyses. Parmi les résultats qui ont attiré récemment l’attention de la communauté, trois publications à consulter :

  • « Un nouveau test de l’universalité de la saveur leptonique à l’aide de la désintégration Λb0→Λc+τντ  », V. Daussy-Renaudin & G. Wormser (IJCLAB, Orsay), courrier CERN, jan. 2022.
  • « Mesure la plus précise au monde (et de loin !) du paramètre de mélange yCP - yCP(Kπ) = (6.96 ± 0.26 ± 0.13) x 10-3 dans les désintégrations de mésons charmés D neutres en deux hadrons chargés légers », G. Pietrzyk (IJCLAB, Orsay), séminaire CERN, fév. 2022.
  • « Observation de phénomènes spectaculaires de violation directe de la symétrie CP dans les désintégrations à trois corps sans quarks charmés B±→K±K+K, B±π±π+π et B±→π±K+K », L. Soares Lavra (LPC, Clermont FD), Moriond QCD22.

Contact

Laurent Vacavant
Directeur adjoint scientifique "Particules et Hadronique" (IN2P3)
Vincent Tisserand
Chercheur au LPC
Yasmine Amhis
Chercheuse CNRS à IJCLab
Perrine Royole-Degieux
Chargée de communication